Les libertins baroques by Michel Onfray

Les libertins baroques by Michel Onfray

Auteur:Michel Onfray [Onfray, Michel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: essai, philosophie
ISBN: 9782246689195
Google: mR2DrvTwZNwC
Éditeur: Grasset
Publié: 2007-04-17T22:00:00+00:00


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Epicure, saint et ventriloque. Gassendi continue sa réhabilitation dans un autre ouvrage, en l’occurrence le Traité de la philosophie d’Epicure (1649). Le livre est inédit dans l’histoire de la philosophie occidentale : certains philosophes ont utilisé le dialogue, la lettre, la dissertation, le traité, l’essai et autres formes littéraires. Gassendi invente pour sa part la ventriloquie philosophique. En effet, tous les propos tenus dans l’ouvrage sont strictement d’Epicure ou des épicuriens. Donc, Gassendi affirme qu’il parle à la première personne, il dit je, mais je, c’est le je d’Epicure. On comprend qu’un pareil amusement avec l’identité d’autrui désigne un personnage rétif au travail cartésien de la construction d’un je clair et distinct...

Gassendi persiste dans la mise en scène et dans la théâtralisation de ses personnages. Après Aristote et Descartes, vient le tour d’Epicure. Quand dans la préface il affirme : « je vais mettre en scène Epicure », comment ne pas penser au travail du librettiste d’opéra? Sur les planches, donc, Aristote le méchant scolastique, l’énervant Descartes, puis le saint Epicure. De quoi fabriquer une pièce de théâtre ou un opéra exprimant l’essentiel de l’enjeu de Pierre Gassendi : en finir avec la philosophie d’Aristote mais pas au profit de la modernité cartésienne, trop suffisante, trop arrogante, trop potentiellement dangereuse pour le catholicisme avec cette promotion soudaine d’une raison forte et toute-puissante. Epicure, voilà la solution, pourvu qu’on le baptise et lui pardonne quelques péchés véniels commis à cause d’une grâce manquante ou défaillante.

La partie éthique de l’ouvrage reprend très fidèlement la doctrine épicurienne, nul besoin de développer : la philosophie comme thérapie ; réduction de la discipline à l’éthique; ataraxie et volupté identifiées au souverain bien; préférence d’un plaisir immobile à un autre en mouvement; douleur et plaisir coïncidant avec mauvais et bon, autrement dit mal et bien; nécessité d’une diététique des désirs – naturels et nécessaires; pratique d’une arithmétique des plaisirs – évitement d’un plaisir coûteux en déplaisir; réduction du monde à des atomes en mouvement dans le vide ; la mort n’est pas à craindre, elle ne nous concerne pas; la douleur est supportable, sinon elle nous emporte; on peut et doit philosopher à tout âge; les dieux n’ont pas figure ou pensée humaine ; et autres points classiques de doctrine.

L'intérêt du texte réside dans un genre de didascalies discrètes, de précisions utiles à la mise en scène intellectuelle. Quelques lignes en fin de chapitre ici ou là, quand Gassendi reprend très brièvement la parole pour manifester son désaccord avec Epicure. Toutes ces notes, on s’en doute, soulignent l’incompatibilité de l’épicurisme et du christianisme. En premier lieu ce qui relève de la Providence divine, à laquelle Gassendi croit. A quoi il ajoute une profession de foi catholique orthodoxe : contre l’âme matérielle et décomposable dans sa forme, il affirme son immortalité et sa non-matérialité; contre l’insouciance des dieux à l’endroit des hommes, il croit en un Dieu bienfaisant; contre des dieux composés de matière subtile situés dans les inter-mondes, l’épicurien professe un seul Dieu parfait dans un



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